Introduction#
Ce chapitre sur le filtrage se divise en plusieurs parties.
Nous commençons par définir les notions de filtre et de système linéaire invariant. Nous introduisons ensuite la notion de stabilité d’un système, et nous terminons par ce qui caractérise un filtre, en particulier sa réponse impulsionnelle et sa réponse fréquentielle.
Dans la seconde partie du chapitre nous expliquons pourquoi un filtre parfait, ou idéal, ne peut être qu”approximé dans la réalité.
La troisième partie ouvre une parenthèse en présentant la transformée de Laplace (qui s’applique sur les systèmes analogiques) et la transformée en Z (qui s’applique sur les systèmes numériques).
Enfin, la quatrième partie présentent des tehcniques pour synthétiser des filtres numériques (RII ou RIF) et analogiques.
Système#
Un filtre est un système, c’est-à-dire un processus qui transforme un signal d’entrée \(x\) en un signal de sortie \(y\). On utilise souvent une représentation en schéma-bloc pour le représenter :
Nous ne considérons dans ce cours que des filtres linéaires et invariants. Ces filtres permettent de modifier un signal d’entrée en atténuant ou en amplifiant certaines de ses fréquences.
Exemple
Une égaliseur est un appareil qui permet d’augmenter ou de réduire les basses et les aigus d’un signal sonore. Il s’agit donc d’un filtre qui va amplifier ou atténuer les fréquences du signal.
Exemple
Un filtre anti-repliement, que l’on utilise en amont d’un convertisseur analogique–numérique, supprime les hautes fréquences afin d’éviter les problèmes de repliement spectral (ou aliasing) lors de l’échantillonnage.
Système linéaire#
Un système \(\mathcal{S}\) est linéaire si, lorsque son entrée est la somme pondérée de deux signaux \(x\) et \(y\), alors sa sortie est la somme pondérée des réponses du système à \(x\) et \(y\) :
Exemple
Un élastique a, dans des conditions d’utilisation normale, un comportement linéaire :
plus le poids qui lui est accroché est grand (\(\alpha\) augmente), plus il s’agrandit (de manière proportionnelle à \(\alpha\)) ;
lorqu’on y accroche deux poids \(x\) et \(y\) différents, sa déformation sera égale à la somme des déformations qu’il aura eu pour chacun des deux poids.
Cependant, si la tension est trop forte, alors il casse et ne s’agrandit plus de manière proportionnelle à \(\alpha\). Dans ce cas, on ne peut plus le considérer comme étant linéaire.
Système invariant#
Un système est invariant dans le temps si son comportement et ses caractéristiques n’évoluent pas. Aussi, si \(y\) est la sortie du sytème à une entrée \(x\), ce sera toujours le cas quel que soit l’instant \(n_0\) auquel apparaît \(x\) :
Exemple
Un circuit électrique peut être considéré comme un système invariant, car normalement les caractéristiques de ses composants ne varient pas dans le temps. Ce n’est pas le cas lorsqu’on observe un circuit sur un temps très long (les composants changent en vieillissant), dans des conditions qui évoluent (la température peut avoir un impact sur la résistance des composants) ou si l’un des composants est modifié (potentiomètre par exemple).
Système linéaire invariant#
Les systèmes à la fois linéaires et invariants jouent un rôle important en traitement du signal. On parle de systèmes linéaires invariant (linear-time invariant system ou LTI system). En effet, la linéarité et l’invariance ont un rôle fondamental pour trois raisons :
la plupart des systèmes physiques possèdent naturellement ces deux propriétés,
l’analyse d’un système linéaire invariant peut être très poussée car c’est un modèle simple d’un point de vue mathématique,
la sortie d’un système linéaire invariant s’exprime par la convolution de l’entrée avec la réponse impulsionnelle du système (ce qui n’est pas le cas pour d’autres systèmes n’ayant pas ces deux propriétés).
Système stable#
Un système est stable si une petite modification de son entrée ne fait pas diverger sa sortie, c’est-à-dire qu’elle revient à son état initial où ne s’en éloigne pas indéfiniment (elle atteint toujours une valeur limite). Formellement, un système est stable si la sortie ne tend pas vers l’infini lorsque l’entrée ne tend pas non plus vers l’infini. On peut montrer que sa réponse impulsionnelle est absolument sommable (c’est-à-dire que l’intégrale, ou la somme, de la valeur absolue des valeurs de la réponse impulsionnelle n’est pas infinie).
Exemple
Un pendule est un système stable : quelle que soit la position et la vitesse initiale qu’on lui donne (et qui constituent l’entrée), il oscillera autour de son point d’équilibre (la sortie du système étant sa position).
À l’inverse, un pendule inversé (qui est initialement positionné avec la masse en équilibre au dessus de l’axe de rotation) n’est pas un système stable : un petit déséquilibre de sa position intiale le fait tendre vers une position d’équilibre différente de la position initiale.
Réponse impulsionnelle#
Un filtre est caractérisé par sa réponse impulsionnelle (impulse response) \(h\). Elle correspond à la sortie du filtre lorsque l’entrée est une impulsion \(\delta\).
On montre que pour n’importe quelle entrée \(x\), la sortie du filtre est la convolution entre \(x\) et \(h\) :
Si l’entrée est une impulsion, la sortie correspond bien à la réponse impulsionnelle \(h\) puisque \(y=h*x = h*\delta=h\).
Réponse fréquentielle#
La réponse fréquentielle (frequency response) est la transformée de Fourier de la réponse impulsionnelle. Elle représente les modifications apportées au signal d’entrée en fonction de la fréquence.
Comme la sortie \(y\) du filtre est la convolution de l’entrée \(x\) avec la réponse impulsionnelle \(h\), alors la transformée de Fourier de la sortie \(Y\) est la multiplication de la transformée de Fourier de l’entrée \(X\) avec la réponse fréquentielle \(H\) :
Très souvent, la réponse fréquentielle est complexe (puisqu’elle est issue du calcul d’une transformée de Fourier). Pour simplifier son analyse on étudiera plutôt son gain, sa phase et son retard de groupe.
Gain#
Le gain (magnitude) \(G\) d’un filtre est le module de sa réponse fréquentielle \(H\) :
Il est souvent défini avec une échelle logarithmique et s’exprime alors en décibel (dB) :
Phase#
La phase (phase) \(\varphi\) d’un filtre est l’argument de la réponse fréquentielle :
où \(\mathrm{Arg}\) est l’argument d’un nombre complexe.
Retard de groupe#
Une autre représentation importante est le retard de groupe (group delay) \(\tau\) défini comme la dérivée de la phase :
Une phase linéaire implique donc un retard de groupe constant.
Exemple
Trois sinusoïdes de fréquences 2, 4 et 6 Hz, fenêtrées par une fenêtre de Hamming, sont mises en entrée du filtre représenté figure Fig. 1. La figure suivante illustre l’effet du gain, de la phase et du retard de groupe sur ces signaux.
Dans la bande passante, le signal d’entrée (sinusoïde de fréquence 2 Hz) n’est presque pas modifié.
À la limite de la bande passante, le signal (sinusoïde de fréquence 4 Hz) est légèrement atténué (effet du gain) mais aussi déphasé et rallongé, ce qui indique un retard de groupe conséquent car le maximum du signal intervient avec un décalage plus important que pour le premier signal).
Enfin, dans la bande atténuée, le signal (sinusoïde de fréquence 6 Hz) est fortement atténué ; il n’est même plus nécessaire de discuter d’un éventuel déphasage ou d’un retard de groupe.