Démodulation sur un canal à bande limitée#

Dans cette section, on n’étudie que la réception des modulations en bande de base lorsque le canal est à bande passante limitée mais sans bruit.

Le signal reçu \(y(t)\) s’écrit alors :

\[ y(t) = (x*g)(t) = \sum_{k=-\infty}^{+\infty} \alpha_k (h*g)(t-kd) \]

\(g\) est le filtre du canal.

La technique de démodulation consiste généralement à filtrer le signal reçu \(y\) par le filtre de réception de réponse impulsionnelle \(r\) puis à l’échantillonner, comme pour un canal idéal. Le signal reçu et filtré est noté \(z(t)\) :

\[ z(t) = (x*g*r)(t) = \sum_{k=-\infty}^{+\infty} \alpha_k (\underbrace{h*g*r}_{u})(t-kd). \]

Interférences entre symboles#

Le filtre du canal \(g\) est plutôt passe-bas et aura donc tendance à « étaler » les formes d’onde du signal émis \(x\). C’est pourquoi, même si la forme d’onde \(h\) est limitée à un intervalle de durée \(d\), la forme d’onde filtrée \(u = h*g*r\) ne l’est pas forcément et peut donc être de durée supérieure à \(d\) : ce phénomène est illustré Fig. 11. Aux instants d’échantillonnage, le signal \(z(t+kd)\) ne dépend plus seulement du symbole sous-jacent, mais également des symboles voisins : on parle d”interférences entre symboles ou IES (ISI : intersymbol interference). Si les IES sont trop importantes, elles peuvent conduire à des erreurs de décodage. Ceci est d’autant plus vrai si le canal est bruité.

../_images/ies.svg

Fig. 11 Interférences entre symboles. Le signal bleu (première ligne) ne contient qu’un symbole autour de \(t=0\). Le signal orange (seconde ligne) contient cinq symboles différents sur \(\{-2d,-d,0,+d,+2d\}\). À cause des interférences entre symboles, les amplitudes aux instants d’échantillonnage (représentés par les points) dépendent des symboles voisins.#

Critère de Nyquist#

Pour éviter les IES, il faut que la forme d’onde filtrée \(u(t)\) soit nulle à tous les instants d’échantillonnage \(kd\) (sauf évidemment pour \(k=0\) ou on peut supposer qu’elle est égale à 1) :

\[\begin{split} u(kd) = \begin{cases} 1 &\text{si } k = 0, \\ 0 &\text{si } k \neq 0 \end{cases} \end{split}\]

On montre que cette condition est équivalente à [Madhow 2008, p. 50] :

\[ \sum_{k=-\infty}^{+\infty} U\left(f+\frac{k}{d}\right) = d \]

\(U\) est la transformée de Fourier de \(u\). Cette condition est le critère de Nyquist (Nyquist ISI criterion). Elle signifie que si la périodisation du spectre de la forme d’onde filtrée \(u\) à une période \(1/d\) (membre de gauche de l’équation) est constant (membre de droite), alors on est assuré qu’il n’y a pas d’IES.

Choix des filtres pour éviter les IES#

Un signal simple qui répond au critère de Nyquist est le sinus cardinal (Fig. 12) \(u(t) = \mathrm{sinc}(t/d)\) dont le spectre est :

\[\begin{split} U(f) = \begin{cases} d &\text{si} |f| \leq \frac{1}{2d}, \\ 0 &\text{sinon} \end{cases} \end{split}\]
../_images/sinc.svg

Fig. 12 Sinus cardinal (avec \(d=1\)).#

Mais le sinus cardinal n’est pas utilisé en pratique pour deux raisons. D’une part il décroît trop lentement (il y a de nombreuses oscillations), et d’autre part cela impose que les instants d’échantillonnage soient très précis.

La solution généralement retenue est d’utiliser un cosinus surélevé (raised cosine, Fig. 13) d’expression :

\[ u(t) = \frac{1}{d} \mathrm{sinc}\left(\frac{t}{d}\right) \frac{ \cos\left(\pi a \frac{t}{d}\right) }{ 1-\left(2 a \frac{t}{d}\right)^2 }. \]

\(a\) est un paramètre choisi en général dans \([0,1[\). Sa transformée de Fourier est :

\[\begin{split} U(f) = \begin{cases} d &\text{si } |f| \leq \frac{1-a}{2d}, \\ \frac{d}{2} \left[ 1 - \sin((|f|-1/2d)\frac{\pi d}{a}) \right] &\text{si } \frac{1-a}{2d} \leq |f| \leq \frac{1+a}{2d}, \\ 0 &\text{si } |f| > \frac{1+a}{2d}. \end{cases} \end{split}\]
../_images/rcos.svg

Fig. 13 Cosinus surélevé (avec \(d=1\) et \(a=0,5\)).#

La décroissance plus rapide du cosinus surélevé par rapport au sinus cardinal est évidente en comparant les Fig. 12 et Fig. 13.

Le critère de Nyquist s’applique sur le filtre global \(u=h*g*r\). Mais comment vérifier le critère de Nyquist lorsque le filtre du canal \(g\) n’est pas contrôlable ? Typiquement, c’est le filtre constitué de la forme d’onde \(h\) (ou filtre d’émission) et du filtre de réception \(r\) qui vérifie le critère de Nyquist, et les IES introduites par le canal sont traitées séparément le cas échéant. Cela signifie que, dans le domaine fréquentiel, \(HR\) est la transformée de Fourier d’un cosinus surélevé. On dit alors que \(h\) et \(r\) sont des filtres en racine de cosinus surélevé (root-raised-cosine filter).